L'histoire D'HAÏTI, depuis ses premiers balbutiements, à l'aurore même de sa naissance que certains veulent assimiler à sa découverte le 6 décembre 1492 par le conquistador italien escorté de soldats espagnols, a toujours été marquée par la participation de quelques grandes dames qui y ont laissé leurs empreintes de façon indélébile. Pourtant, nos historiens, le plus souvent, ont choisi de les négliger ou même de taire leurs noms, même quand elles ont laissé leur peau dans la lutte qu'elles avaient entreprise à côté d'hommes qu'elles ont rivalisés en bravoure et en vaillance pour la libération de ce coin de terre. 

Le 18 mai 1803, nos Preux, nos va nus pieds, sous le leadership éclairé et avisé du Général Jean Jacques Dessalines, ont créé à l'Arcahaie, leur propre drapeau, le bicolore bleu et rouge qui a connu plusieurs modifications dans la suite. À côté du Général en Chef, défilaient de nombreuses femmes, les unes plus braves que les autres, aussi disciplinées et aussi formées que les hommes. Certaines d'entre elles sont connues pour leur bravoure qui allait parfois jusqu'à la témérité. On peut citer des noms comme : Anacaona, Caterine Flon, Cécile Fatiman, Marie Louise d’Haïti, Suzanne L'ouverture, le Lieutnand Sanite Belair, Guillaumette Charlot, Pierrette Jolibois, Henriette Saint Marc, Défilée (La Folle), Toya, Marie Jeanne. Je vous fais grâce du reste.

Je ne vais pas vous parler de toutes ces femmes précitées. Je n'entends pas non plus vous parler des plus proéminentes. Mais je veux vous parler de quelques-unes que l'on a tendance à oublier ou à négliger. Je pense qu'à l'occasion de la FÊTE DU DRAPEAU en ce 18 mai, qui marque le cent vingt et unième anniversaire de la création du bicolore, il est de toute justice de leur rendre cet hommage plus que mérité.

Claire Heureuse, de son vrai nom MARIE CLAIRE HEUREUSE FÉLICITÉ. Esclave. D'une beauté incomparable. Agent de Santé par formations. Elle apprit à lire très tôt. Elle se maria à un peintre français à qui elle n'a pas donné d'enfant. Son mari, Monsieur Petit, mourut. La veuve se donna pour mission de soigner les soldats blessés sur les champs de bataille. Et c'est là qu'elle rencontra le Général Dessalines qui est tombé amoureux d'elle et avec qui elle se maria en l'église Sainte Rose de Lima, de Léogane. Elle a donné sept enfants au Général. Deux sont morts en bas âge. Elle légitima et adopta tous les autres enfants de l'Empereur. Quelle grandeur d'âme. Ça, l'histoire courante ne nous l'a pas dit. Et après l'assassinat de Dessalines, elle fut obligée de partir en exil avec ses cinq enfants, et les autres, chassés par J P BOYER, pour ne revenir que sur demande de l'Empereur Faustin Soulouque, fils de Dessalines lui aussi et qui lui a remis ses titres de noblesse.

CATHERINE FLON. Elle est née en 1772 et est morte en 1831. Elle est connue seulement pour avoir cousu le Bicolore à l'Arcahaie le 18 mai 1803. Mais l'histoire courante ne nous a jamais enseigné qu'elle fut une des enfants du Général Dessalines qui l'a eu d'une femme du nom de Marie Augustine Flon. Cette femme de Catherine Flon une révolutionnaire hors pair, s'était servie de ses longs cheveux en guise fil pour coudre le drapeau.

HENRIETTE SAINT MARC est une autre jeune et belle femme qui ne manquait pas d'attirer les regards des hommes en quête de bonne chair pour le plaisir sexuel. On ne sait rien de ses origines, de sa famille, de sa formation. On la voyait simplement passer à la rue des casernes, devant le baraquement militaire où montaient la garde principalement des régiments Guyannais, des Normands et des Artois. Ne pouvant résister devant le charme de cette déesse de beauté, les soldats souvent l'abordaient, la courtisaient et arrivaient même à la coucher dans le voisinage de leurs baraquements. Elle ne leur réclamait pas d'argent, mais de la poudre ou des cartouches qu'elle apportait aux soldats de l'armée indigène. Un jour, après la déportation de Toussaint Louverture en France, elle fut arrêtée et conduite en prison, pour avoir été découverte dans ses astuces. Après un petit laps de temps en prison elle fut jugée pour son forfait et condamnée à la peine de mort. Deux jours après, elle fut arrachée de la prison, à dix heures du matin, placée entre deux pelotons de carabiniers français, suivie de son cercueil et conduite sur la Place du marché, en face de l'église. En présence d'une foule immense de gens venues d'un peu partout, on dressa une potence. Courageusement, elle gravit l'échafaud. Une rafale de cartouches la traversa. Et son cadavre balança sous les yeux émus et éplorés de cette foule impuissante et attristée qui poussa des cris et des sanglots, puis abandonnèrent les lieux. HENRIETTE SAINT MARC a bien mérité de la PATRIE. Qu'on se souvienne d'Elle en ce 18 mai 2024 et qu'on ait pour elle une pensée toute spéciale en cette occasion.

GUILLAUMETTE CHARLOT. Encore un autre nom, une autre figure de proue jetée aux oubliettes de notre histoire. Pourtant, elle figure bien parmi les officiers promus au grade de CAPITAINE dans le premier bataillon du septième régiment de l'Artibonite en 1820. C'est une héroïne de la guerre de l'Indépendance. Que la nation entière se mette debout et se découvre devant elle en ce 18 mai, pour lui rendre un hommage bien mérité. Elle a travaillé pour ça.  

SUZANNE LOUVERTURE. Elle fut l'épouse du tout puissant général TOUSSAINT LOUVERTURE, pourtant, d’une simplicité hors pairs, elle pratiquait l'agriculture, laissant ainsi son illustre époux vaquer seul dans ses affaires politiques. Elle cultivait beaucoup de café et des vivres. Ce qui lui permettait, comme aux temps où, avec Toussaint, ils étaient esclaves des champs, d'économiser un peu d'argent et de voler au secours de ses frères et sœurs qui étaient dans le besoin. Toussaint Louverture, pris dans un guet-apens tendu par Brunet, fut envoyé en France où il va mourir de froid et de faim. Sa femme Suzanne fut arrêtée peu de temps après et conduite, elle aussi, en France où elle connut les pires tortures ; car Napoléon, connaissant Toussaint, avait recommandé aux bourreaux de ne pas se fatiguer à le torturer ; car il ne parlerait jamais. Mais de maltraiter Suzanne de préférence jusqu'à ce qu'elle avoue les secrets de son mari. Peine perdue. Suzanne était plus dure que son mari. À toutes les questions qui lui étaient posées sur Toussaint, elle répondait avec un calme déroutant :" JE NE PARLERAI PAS DES AFFAIRES DE MON MARI AVEC SES BOUREAUX ". C'est avec plusieurs os cassés, dépourvue de tous ses ongles, meurtrie, fatiguée qu’elle rentra à la Jamaïque pour y mourir le 19 Mai 1846, à l'âge de 67 ans. C'est donc l'anniversaire de la mort de Suzanne Louverture cette semaine de l'anniversaire de Bicolore Haïtien. Ayons donc une pensée très spéciale pour elle, cette femme au grand cœur.

MARIE JEANNE. C'est la compagne adorée et inséparable de Lamartinière à côté de qui elle s'est fait distinguer pendant la bataille de la CRÊTE À PIERRÔT quand ce fort fut assiégé par une armée française de 12.000 hommes. D'un bout à l'autre, elle traversait les remparts tantôt distribuant cartouches, tantôt chargeant les canons. Et quand le besoin se faisait sentir, au fort de l'action, elle passait au premier rang des soldats et manœuvrait les fusils avec un entrain extraordinaire. Après la mort de Lamartinière, elle se retrouva dans les bras de Dessalines, partageant parfois son lit. Ce dernier l'aimait beaucoup à cause de sa vaillance, sa jeunesse et sa beauté. Marie Jeanne est connue comme une vengeresse redoutable de la CRÊTE À PIERRÔT. C'est la personnification de l’héroïsme féminin en Haïti. Pensons à Elle et à toutes ses actions en ce 18 mai, jour de Gloire pour nos Ancêtres.

TOYA. Son vrai nom, c'est VICTORIA MANTOU. Elle fut une femme d'une énergie peu commune. Elle fut esclave et astreinte au travail quotidien des champs. Elle se trouvait esclave sur l'habitation Cahos. Elle fut une compagne de Dessalines. Elle fut transférée par son maître à Déluger où elle fut placée en à la tête de cinquante esclaves. Elle parlait d'une voix forte, bien timbrée. Elle commandait comme un homme. Elle s'est fait remarquer et à attirer l'attention de ses supérieurs au cours d'une rébellion surgissant de sa petite troupe qui s'est révoltée contre leur maître. Mais, ce fut vite étouffé par un régiment qui les a toutes faites prisonnières. Mais Toya a eu le temps de se sauver. Poursuivie par deux militaires. Un corps à corps eût lieu entre eux et Toya. L'un d'eux fut grièvement blessé par Toya. Et l'autre, aidé par quelques autres soldats venus en renfort, Toya fut faite prisonnière. En 1805, peu de temps après l'établissement de l'empire, l'état de santé de Toya commençait à se dégrader et laissait craindre le pire. Docteur Jean Baptiste Mirambeau fut appelé à son chevet par l'Empereur qui l'avait présentée au médecin comme étant une parente, car elle vivait chez Lui. Il lui demanda de faire de son mieux pour la remettre sur pieds ; car c'était une compagne des champs et d'armes. Malheureusement, Toya mourut le même jour. C'était le 12 juin 1805. Cette femme a sa place dans le cœur de tous les Haïtiens de tous les temps. Allumons une chandelle en son nom en ce 18 mai 2024. Elle le mérite bien.


PIERRETTE JOLIBOIS. Voici un nom cité nulle part dans nos livres d'histoire. Et pourtant, cette femme fut GRENADIER du troisième bataillon du régiment PRINCE ROYAL. C'est l'Almanach ROYAL D'HAÏTI qui l'a cité parmi un grand nombre d'autres femmes officiers, de l'armée D'HAÏTI. Courbons-nous bien bas devant elle aujourd'hui pendant que nous pensons à tous nos héros en ce jour faste de notre glorieuse histoire. 

Ces quelques femmes qui ont fait l'histoire de notre pays, tout en se sacrifiant aux côtés de nos Preux pour nous léguer ce coin de terre et que nous avons citées ne sont pas les seules à qui nous devons cet hommage. La liste serait infiniment longue. Mais, par ce petit devoir de mémoire, nous avons voulu rendre un hommage à toutes celles qui, comme celles-ci, ont apporté leurs généreuses et grandioses contributions à la construction de l'édifice D'HAÏTI.

Jean William GUILLAUME


NÉ AUX CAYES. 


PROFESSEUR DE FRANÇAIS, D'ANGLAIS, D'ESPAGNOL, DE LATIN ET D'HISTOIRE. PRÉFET DES ARRONDISSEMENTS DES CAYES ET DE PORT SALUT. SUPERVISEUR DÉPARTEMENTAL DU CEP DANS LE NORD OUEST( ÉLECTIONS…

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