La Rivière Watapan, de son nom Taïno, va devenir la rivière Dajabon, renommée par les Espagnols du côté dominicain et prendra le nom de Rivière Massacre du côté haïtien. Il est généralement connu que le nom Massacre est attribué à la rivière après que le Président dominicain Rafael Trujillo, en 1937, ordonna à l'armée dominicaine de chasser (par la force s’il le faut) des cultivateurs haïtiens installés en nombre sur la rive droite dominicaine à qui il avait intimé l’ordre de repasser du côté haïtien de la rivière. Les récalcitrants, plus de 20 000, furent tout simplement tués. Toutefois, l’espace semble être lié à ce genre de tragédie ; on retrouve le terme rivière Massacre à plusieurs reprises dans la « Description de Saint Domingue » de Moreau de St Méry, lié au massacre des boucaniers français par les Espagnols en 1797 dans la même zone.

La Rivière Watapan, de son nom Taïno, va devenir la rivière Dajabon, renommée par les Espagnols du côté dominicain et prendra le nom de Rivière Massacre du côté haïtien. Il est généralement connu que le nom Massacre est attribué à la rivière après que le Président dominicain Rafael Trujillo, en 1937, ordonna à l'armée dominicaine de chasser (par la force s’il le faut) des cultivateurs haïtiens installés en nombre sur la rive droite dominicaine à qui il avait intimé l’ordre de repasser du côté haïtien de la rivière. Les récalcitrants, plus de 20 000, furent tout simplement tués. Toutefois, l’espace semble être lié à ce genre de tragédie ; on retrouve le terme rivière Massacre à plusieurs reprises dans la « Description de Saint Domingue » de Moreau de St Méry, lié au massacre des boucaniers français par les Espagnols en 1797 dans la même zone.

Contexte général

Tort ou raison, tous les prétextes sont bons. Malgré la perfidie des protagonistes à Ryswick en 1697, malgré le poids du temps et toutes les manigances des pays occidentaux en particulier, au cours des ans, voilà que la Rivière Massacre nous rappelle, après plus de trois cent vingt-cinq (325) ans, que l’Île d’Ayiti, Quisqueya ou Bohio est une et indivisible.

Sous le règne de l’Empereur Jacques 1er comme sous celui du Président Boyer, l’île avait retrouvé tant soit peu son unité mais pour des raisons liées à la survie de la souveraineté. On pourrait faire un parallèle avec une situation similaire actuellement dans les Balkans où la Russie se voit dans l’obligation d’occuper le territoire Ukrénien pour protéger le sien contre les velléités cachées du bloc des pays de l’Ouest à l’intérieur de l’Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (OTAN), Etats-Unis en tête, de s’emparer de son territoire, en quête de ressources naturelles pour assurer le maintien de leur hégémonie sur le monde.

De même, avec une Indépendance encore fragile, isolé et avec de maigres ressources, il fallait protéger le territoire à l’ouest comme à l’est contre un quelconque retour des colons européens.

Cette pseudo indépendance est la pierre d’achoppement, le boulet de canon qui traîne le pays dans les profondeurs abyssales où il se trouve aujourd’hui. Haïti reste le symbole universel de la liberté des noirs et de la liberté tout court. La guerre de treize (13) ans qui a vu la chute de l’ennemi en novembre 1803 et permis la proclamation de l’Indépendance en janvier 1804 n’a pas seulement libéré Hayti et le reste de l’Amérique mais a surtout mis à mal le nouvel ordre mondial de l’époque dont les fondements étaient basés sur l’esclavage.

Malgré les errements de beaucoup de nos compatriotes qui, ce faisant, ont contribué largement au maintien du boulet de canon dans nos pieds, ce sont encore les ressentiments de cette défaite qui animent les dirigeants occidentaux, ordonnés dans l’ombre, pour orienter leurs comportements dans leurs rapports avec Haïti.

 

 

Le conflit sur la rivière Massacre n’est sans doute pas exempt, il porte la teinte de ce ressenti séculaire, et la République dominicaine, enfant docile des occidentaux, se prête bien au jeu. Les réactions des pays occidentaux ou pro-occidentaux à la réunion du Conseil de l’Organisation des Etats Américains le 13 octobre en cours témoignent de ce sentiment. Le diplomate américain a été très direct et très clair dans son penchant pour son dauphin de la République dominicaine.

Tort ou raison

Venons-en aux faits, penchons nous sur l’aspect ponctuel des événements.

Dossier S644/74/15 - No.2414 République Dominicaine et Haïti - Traité de paix, d'amitié et d'arbitrage, signé à Saint Domingue, le 20 février 1929 - Enregistré le 7 août 1930, à la demande du Secrétaire d'Etat aux Affaires étrangères de la République dominicaine - Recueil des traités, Vol.105

Ce traité de février 1929, consacré à la ressource hydrique de la rivière Massacre fait suite à celui plus large de la délimitation des lignes frontalières de 1901 qui annonçait déjà les couleurs, en son article premier.

Considérant que, pour son existence légale et comme unique lien juridique qui doit unir la République d’Haïti et la République Dominicaine en ce qui touche leurs frontières, cette ligne doit être décrite dans un traité et son tracé doit être réalisé sur le terrain ;

À cet effet, le Président de la République d’Haïti et le Président de là République Dominicaine ont nommé leurs plénipotentiaires respectifs, à savoir :

Le Président de la République d’Haïti:

  • Monsieur le licencié Léon DÉJEAN, Envoyé Extraordinaire et Ministre Plénipotentiaire de là République d’Haïti dans la République Dominicaine;

Le Président de là République Dominicaine:

  • Monsieur le Dr José D. ALFONSECA, Vice-Président de la République, secrétaire d’État de l’Intérieur, de la Police, de la Guerre et de la Marine ;
  • Dr Manuel de J. TRONCOSO de là CONCHA, professeur de l’Université centrale, président du Tribunal supérieur des Terres;
  • Monsieur le licencié Francisco J. PEYNADO;
  • Monsieur le licencié Angel MORALES, envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire de là République aux États-Unis d’Amérique ;
  • Monsieur le licencié M. A. Peña BATLLE, consulteur juridique de là Légation dominicaine à  Port-au-Prince,
  • et M. le général José DE J. ALVAREZ.

 

Lesquels, après s’être communiqué leurs pleins pouvoirs, sont convenus des articles suivants :

Article premier:

1) La ligne frontière entre la République d’Haïti et la République Dominicaine part du Thalweg de l’embouchure de la rivière de Dajabon ou Massacre, dans l’Océan atlantique (Baie de Mancenille, au Nord de l’île) et suivant le cours de cette rivière jusqu’en face de là ville de Dajabon, selon le tracé fait en 19O1 par la Commission mixte haïtiano-dominicaine, de la ligne frontière dans l’extrême Nord ;

2) De Dajabon, elle suit toujours le cours de là rivière Dajabon ou Massacre jusqu’à son confluent avec la rivière Capotille ou Bernard, selon les études de là même commission, qui sont considérées comme annexées au présent traité ;

Il faut dire que les dominicains prenaient déjà très au sérieux la question, il suffit de voir la taille de leur délégation comparé à celle d’Haïti. De plus, on remarquera que le nom Alvarez revient dans le dossier ; du Général en 1901 au Ministre en 2023, on retrouve la marque des traditions dans la politique chez les dominicains, ce qui assure de la rigueur et de la constance dans le traitement des dossiers en général. Soit dit en passant, cette rigueur et cette constance font grandement défaut à nos compatriotes du gouvernement haïtien et à beaucoup de leurs prédécesseurs.

Ceci dit : « Tort ou raison », il faut creuser. Regardons de plus près le traité de 1929.

Article 10 : Le droit d’usage des rivières et autres cours d’eau

L’article 10 du traité prévoit que les deux pays ont le droit de jouir, d’une manière juste et équitable, les rivières et autres cours d’eau qui naissent sur le territoire d'un des deux Etats, traversent sur le territoire de l'autre ou leur servent de limites. Et, aucun des deux Etats ne peut aucunement priver l'un ou l'autre du droit d'user, dans les limites de leurs territoires respectifs, desdites rivières et autres cours d'eau pour l'arrosage des terres et autres fins agricoles et industrielles.

On ne peut plus clair !… Avant même d’arriver à l’article 10, les articles 3 à 9 stipulent, en gros, ce qui suit:

« Outre la paix, l'établissement d'un mécanisme d'arbitrage pour résoudre les conflits futurs entre Haïti et la République Dominicaine est sans conteste l'un des éléments les plus importants de ce traité. En effet, les parties conviennent de résoudre tout différend par des moyens pacifiques, et ce, en utilisant l'arbitrage international comme moyen privilégié de règlement des différends. Cela visait à éviter les hostilités armées et à favoriser une résolution pacifique ».

Toutefois, le fait que la République dominicaine aie pu construire onze (11) ouvrages pour bénéficier de la ressource de la rivière Massacre fait qu’il apparaît une sorte d’hégémonie de sa part sur cette ressource partagée. La rivière a subi une régression de presque 50% de son débit par rapport aux relevés de 1999, et les dominicains eux-mêmes, dans une note d’information publiée le 26 mai 2021 par des voix autorisées des ministères de l’environnement et des ressources naturelles et de l’agriculture ainsi que des deux principaux organismes de gestion de l’eau de ce pays, l’Institut national des ressources hydrauliques (Indrhi) et l’Institut national de l’eau potable et de l’assainissement (Inapa) reconnaissant avoir dérivé un débit de 3.22 m3/s de la rivière Massacre à travers 10 canaux d’une longueur totale de 38,10 kilomètres. De plus, la République Dominicaine reconnait l’existence d’un barrage en terre pour stocker de l’eau à des fins d’irrigation dans la zone de Cabeza de Caballo qui a un volume de stockage de 0,6 million de m3 et un barrage en construction appelé La Piña d’un volume de stockage de 1 million de m3 d’eau. Le 11e canal, celui de la Vigie, n’était plus fonctionnel au moment de cette note.

Quelles sont les conditions techniques requises pour une exploitation régulière, respectueuse des normes environnementales ? Ets-ce que les ouvrages dominicains respectent les spécificités et les normes ? Est-ce que l’Etat haïtien avait été informé afin de vérifier le respect des dites conditions d’exploitation ? Est-ce que le canal, du côté haïtien, est construit dans le respect des principes établis et est conforme aux règles établies pour l’utilisation de la ressource partagée ?

Il faudra répondre à ces questions pour départager les responsabilités et remettre les pendules à l’heure.

Le Manuel sur la répartition des ressources en eau dans un contexte transfrontière de la Commission Economique des Nations-Unies pour l’Europe (UNECE), dans l’article 1 de son préambule intitulé Messages principaux, stipule ce qui suit : 1. La répartition des ressources en eau transfrontières détermine un ou plusieurs des éléments suivants : la qualité, la quantité, et/ou la périodicité de l’eau à la frontière entre États riverains, et confère des droits associés. En résumé, la répartition de l’eau détermine qui peut utiliser les ressources en eau partagées, en quelle quantité et de quelle qualité, à quelles fins, où et quand.

En bref, La gestion des ressources en eau partagées doit prendre en compte non-seulement les aspects scientifiques et techniques de la gestion des ressources en eau, mais également les aspects juridiques, économiques, culturels, sociaux et historiques spécifiques.

L’ingénieur Ginette P. Mathurin rapporte que, selon la convention des Nations-Unies de 1997 en son Article 7, l’utilisation de la ressource par les Etats limitrophes est sujette aux respect des normes, même dans les limites de leur territoire, visant à ne pas porter préjudice l’un à l’autre, notamment lorsqu’il s’agit d’ériger un ouvrage qui pourrait altérer le cours d’eau, le dévier ou menacer la biodiversité qui y vit ; l’état constructeur doit prendre toutes les mesures nécessaires pour éviter de tels dommages.

Elle continue pour expliquer que le débit capté sur une rivière, encore plus quand il s’agit d’une ressource partagée, ne doit pas dépasser les 20% du débit d’étiage récurrent sur une période de deux ans, calculé pendant sept jours consécutifs. Résultat duquel on déduit 20% pour déterminer le débit autorisé à capter. Ceci permet d’assurer la pérennité du cours d’eau et de garantir la disponibilité pour les autres usages potentiels de la ressource. Il est également recommandé de prendre en compte les ouvrages existants, en amont comme en aval. Les autres considérations importantes dans le cas des captages proposent de minimiser les interventions d’entretien et de dragage à long terme, d’éviter de capter aux points de sédimentation sur la rivière et sur les points d’habitats de plantes aquatiques ; il faut aussi que le point de captage soit suffisamment profond de manière à correspondre au niveau d’étiage et enfin, un point où le substrat naturel est assez grossier.
https://www.youtube.com/watch?v=8h_X47D98k8 / (à partir de minute 40 :45 à 1 :08 :32)

Les bassins hydrographiques transfrontières de la planète contribuent au développement économique et social de l’humanité et abritent une importante proportion de la biodiversité mondiale. Au total, 2,8 milliards de personnes dans 151 pays se partagent 286 bassins hydrographiques transfrontières.

Selon une étude de cas survenus entre 1950 et 2000, il y a eu 1228 initiatives de collaboration contre 507 conflits autour de ressources hydriques partagées transfrontières. (www.quizlet.com)

Il serait peut-être utile de voir comment sont gérées les relations pour les 285 autres bassins hydrographiques transfrontières pour arriver à une solution viable entre Haïti et la RD. La rivière Massacre n’a pas de conflit avec ses affluents, ils sont tous quisquéyens. Ils font le labeur quotidien pour lequel ils existent, naturellement, sans broncher et sans se plaindre.

S’il est vrai que l’homosapiens est l’être supérieur de la création, alors inspirons-nous de la nature pour ajuster nos comportements…

A propos de

Rudolf Dérose

Rudolf Dérose est né à Port-au-Prince, sa situation familiale, très jeune, le conduit en province où il fait connaissance avec le mode de vie en région, il apprend à apprécier ses charmes et ses richesses.

De retour à Port-au-Prince à l’âge de 12 a…

Biographie