Entre la liberté et la contrainte de travailler existe une marge sinon une mince ligne qui reflète l’attitude de personnes équilibrées, c’est-à-dire aptes à s’adapter aux multiples changements qui nous affectent en tant qu’individus évoluant dans la nature qui nous abrite. Sauf en cas d’hébétude, l’esprit de l’homme s’active dans un sens ou dans l’autre.

Entre la liberté et la contrainte de travailler existe une marge sinon une mince ligne qui reflète l’attitude de personnes équilibrées, c’est-à-dire aptes à s’adapter aux multiples changements qui nous affectent en tant qu’individus évoluant dans la nature qui nous abrite. Sauf en cas d’hébétude, l’esprit de l’homme s’active dans un sens ou dans l’autre. Dans un sens, on récolte l’abjection, dans l’autre une pensée positive capable de maintenir la marche vers l’évolution infinie, si, bien sûr, les adeptes veulent constamment s’atteler à la tâche.

Observons bien ces deux cas de figures pour déterminer dans quelle mesure le facteur travail peut nous amener à faire un choix. Restons persuadés cependant que la caractéristique même du changement est inexorablement la constance. Pour ramener les choses à notre niveau, essayons de rappeler tout au moins ce que Haïti représentait pour les pays colonialistes qui l’occupaient ouvertement à l’époque. C’était leur grenier en général. On disait d’elle la perle des Antilles. Une vraie convoitise, ce coin de terre. Espagnols, Anglais et Français en faisaient leur beurre.

En effet, on leur procurait de tout : la canne à sucre dans les champs, le sucre qu’on en extrayait dans les usines, le coton, l’indigo et le cacao. On leur gardait certainement leur bétail, plantait les nourritures de leur choix. On leur fournissait aussi bien des femmes, d’où les mulâtres, cette passerelle jetée, entre les deux races, foyer de la brise de la déclaration des droits de l’homme. Il n’est un secret pour personne que le régime imposé sur les esclaves était extrêmement dur, inhumain, par conséquent intolérable. Il fallait chercher à le contourner, l’assouplir ou s’en débarrasser. Rien à perdre pour les noirs transformés en bêtes de somme. Cependant, dès le début de la traite, le travail, le point fort de ce négoce, était la pierre angulaire.

L’approche de libération courtisée par Toussaint Louverture n’a pas pu lézarder le mur de la volonté des blancs. Elle a plutôt créé des dissensions dans le rang indigène à plusieurs niveaux. À maintes reprises, Toussaint dut sévir contre les siens pour maintenir l’unité dans l’armée dont il s’était entouré pour dissuader et amener l’occupant à négocier un nouveau contrat à St-Domingue. On se rappelle aussi le phénomène de désertion qui se produisait dans le domaine agricole. Tourner le dos aux plantations affaiblissait la production de la terre que Toussaint voulait sauvegarder à tout prix. Mais, jusqu’ici la colonie valait son pesant d’or, car le travail, la vraie valeur individuelle, était de rigueur dans la constitution rédigée par le général noir…

Après la déportation de Toussaint, le feu de la révolution a raccourci puis consumé la démarche diplomatique. Général Dessalines nous a conduits à l’indépendance: vivre libre ou mourir. C’était la grande fête, puis la séparation des biens. La grande et la petite propriété. Les grands généraux se sont taillé la part du lion, les soldats se sont servis, puis le peuple a dû se contenter des miettes. À cet effet, l’organisation du facteur travail a pris un sérieux coup, car le contexte international n’était pas prêt à encaisser le brutal exemple établi par les nouveaux libres. La consommation allait dorénavant être nationale. Cette suite de situations imprévues, immédiates, connectées au développement du pays dans le futur, avait probablement alourdi les mains de Louverture. Est-ce bien cela qui le faisait ronger ses freins pour prévenir l’éviction de St Domingue du circuit mondial ?

Évidemment tout cela remonte à plus de deux cents ans.  Cependant, le problème est encore d’actualité. Le travail tant essentiel a perdu de son essence. Une administration fantôme, des postes vides de substance, un rendement fantoche. L’irresponsabilité bat son plein. Dans les écoles, l’enseignement n’aborde pas la question du travail. 

Où donc se terre le travail? Dans l’artisanat, l’agriculture, à l’étranger? À ce stade, une définition du travail serait nécessaire.