Bien longtemps avant qu'on l’ait fait dans les autres pays, ''peyi lock'' oblige, les Haïtiens ont été obligés de s'emprisonner chez eux. S'ensuivit le confinement forcé par Covid 19. Ces événements ont failli coûter l'année scolaire 2019-2020 à nos chers écoliers.

Bien longtemps avant qu'on l’ait fait dans les autres pays, ''peyi lock'' oblige, les Haïtiens ont été obligés de s'emprisonner chez eux. S'ensuivit le confinement forcé par Covid 19. Ces événements ont failli coûter l'année scolaire 2019-2020 à nos chers écoliers. Pour éviter cela, les responsables du MENJS ont dû rogner les vacances d'été afin de rattraper les nombreux jours perdus fixant ainsi la rentrée des classes 2020-2021 au 9 de ce mois de novembre, contrairement aux années précédentes où nos chers écoliers regagnaient leurs établissements à la première semaine de septembre. 

Ce retour tardif m'interpelle d'une autre manière. Tout en cherchant la solution pour éviter aux enfants de perdre une année de formation, ne serait-il pas aussi temps de revoir le bagage académique qu’on leur inculque ? Ce n'est pas que le programme actuel soit tout à fait mauvais, loin de là. Nos enfants arrivent sans trop grand effort à intégrer d'autres systèmes éducatifs,  et parfois même avec brio. Cependant, il est impératif d’améliorer le nôtre pour l'adapter à nos propres besoins d'Haïtiens.

Comment comprendre que, vivant sur une île, la majorité des habitants de cette portion de terre ne savent pas nager? Au lieu de jouir pleinement de ce trésor qu'est la mer, on la considère souvent plutôt comme un danger. Les parents craignent toujours d'envoyer leurs enfants dans les journées à la plage organisées autrefois par les écoles. Et c'était avec la tête remplie d’appréhensions que les responsables s'engageaient à emmener les élèves se récréer à la mer, car il fallait à tout moment surveiller les jeunes baigneurs pour éviter une éventuelle noyade. Le plaisir d'un bon bain dans l’océan reste limité pour beaucoup d'entre nous. Ne serait-il pas nécessaire d'ajouter un cours de natation au curriculum dès la première année fondamentale? 

Notre cher pays doit sa beauté,  la douceur de son climat tropical à sa position géographique. Mais, le revers de la médaille est aussi qu'il est sur la trajectoire des intempéries. Chaque année, de juin à novembre, nous croisons les doigts en espérant la clémence des forces divines  pour une calme saison cyclonique. Cependant, nos enfants récitent machinalement et parfois même sans comprendre la définition des ouragans. Ne serait-il pas judicieux, de leur apprendre les dangers auxquels ils sont exposés et comment se préparer pour y faire face, le cas échéant ? Cela diminuerait sans doute le nombre de victimes recensées chaque fois que le pays subit les crises de colère de la nature. 

Malheureusement, il n'y a pas que ça. Assise sur des failles, Haïti peut à tout moment secouer. Ce n'est que tout récemment après la catastrophe du 12 janvier 2010 que le mot séisme semble avoir fait son apparition dans les ouvrages scolaires. Là encore, ne devrait-on pas dès leur tout jeune âge apprendre à nos enfants les comportements à adopter au cas où la terre se mettrait à trembler?

Parallèlement à ces facettes dangereuses de notre bout d’île qui nous imposent à enseigner à nos écoliers de nombreuses précautions à prendre, il y en  a d’autres très intéressantes. Une petite balade au champ de mars à Port-au-Prince et à travers les rues de bien des villes de province comme Jacmel expose à la vue de tous, le potentiel artistique du peuple haïtien. Sur les réseaux sociaux, on a l'occasion de découvrir des arts inconnus de notre patrimoine culturel. Ne serait-il pas approprié dès l'enfance de découvrir nos capacités artistiques à travers des activités ludiques, telles que la peinture, l’artisanat, l'art culinaire, la musique, la danse… Nous avons une culture tellement riche et belle ! Cela aiderait sans aucun doute à atteindre notre plein développement personnel tout en assurant la pérennité de notre identité de peuple qui a tendance à s'effriter, voir même se perdre à cause du phénomène d’acculturation qui la mine.

C'est vrai que chez nous, un véhicule est un luxe. Mais, en réalité, dans toute société moderne, c'est une nécessité car tous, on peut être confronté à une urgence et être forcé de prendre le volant pour sauver sa vie ou celle des autres. Dans de nombreux pays étrangers, c'est un cours offert aux élèves dès l’adolescence. 

On ne cesse de s’apitoyer sur la dégradation environnementale de notre pays. N’est-il pas urgent de sensibiliser les jeunes sur les conséquences d’une telle situation ? Devrait-on attendre de fréquenter la faculté d’agronomie pour avoir des connaissances sur l’importance de préserver notre habitat ? Pourquoi ne pas introduire un cours adapté au niveau de compréhension de nos jeunes écoliers pour leur inculquer des notions sur l’environnement ?

Nous avons une histoire extraordinaire qui devrait nous servir de motivation et de guide sur les chemins de l’épanouissement, du développement, de la reconnaissance  internationale, du respect et de la gloire. Le mode d’enseignement des hauts faits de notre passé ne nous insuffle pas la fierté que nous devrions en tirer et qui devrait nous faire travailler avec ardeur pour la prospérité et la grandeur permanente de notre patrie. À l'école, les petits répètent comme des perroquets des phrases dont la portée leur échappe totalement. Il est possible dès les premières années de leur faire comprendre que nous sommes une grande nation, qu’ils sont les descendants d’hommes et de femmes illustres qui ont cassé les chaînes de l’esclavage pour accéder à leur liberté et en ouvrir la voie à d’autres nations, changeant ainsi à tout jamais le cours de l’humanité. 

Il est grand temps de repenser le système éducatif haïtien. Faisons-le  plus historique, plus culturel, plus scientifique, plus pratique en vue de l'adapter à nos besoins spécifiques, notre vie quotidienne, notre réalité de peuple pour une Haïti, belle et prospère, digne de nos aïeux!
 

Marie Johane Brinnius Banatte est née à Jacmel où se déroula sa petite enfance. Puis, elle vécut une grande partie de sa jeunesse à Port-au-Prince pour poursuivre ses études secondaires et universitaires.

Établie depuis environ 20 ans dans la métro…

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